Chantier naval Dubourdieu : Comment le bateau traditionnel des ostréiculteurs du bassin d’Arcachon devient un objet d’art ?
Dubourdieu, artisan du luxe maritime
Dubourdieu est le plus ancien chantier naval français encore en activité. Plus de 3 000 bateaux ont été construits avec la même rigueur et la même passion sans jamais faillir à leur philosophie. Du chalutier de pêche à la pinasse d’ostréiculteur, l’histoire du chantier naval Dubourdieu est celle de la navigation à moteur : le premier moteur marin diésel fut installé sur un Dubourdieu en 1942.
1800
C’est en 1800 qu’un jeune charpentier du nom de Louis Dubourdieu fonda un chantier de construction de “tilloles”, mot ancien désignant des bateaux de pêche à rames qui étaient déjà construits à l’unité selon les demandes spécifiques de chaque ”patron“.
La pinasse
A l’aube du XXème siècle, Emile Dubourdieu, 4ème du nom, propulse le chantier dans la révolution industrielle en construisant les premiers bateaux à pétrole. C’est en 1900 environ qu’apparaît le nom de « pinasse », dont l’origine est controversée. Pour certains, il viendrait du pin, bois souvent utilisé dans leur fabrication. Pour d’autres, il viendrait du droit de « pinasse » perçu par les seigneurs testerins sur toute pêche effectuée sur le bassin, et abolie à la fin du XVIIIème par décret royal.
Un petit bijou de plaisance
Au début des Années Folles, le Bassin d’Arcachon devient un lieu de villégiature très coté. Les riches négociants bordelais se font ériger des « folies » dans la Ville d’Hiver. Les distractions étant rares et les bains de mer quelque peu frais, ces touristes avant l’heure se tournent vers la mer et découvrent les joies de la navigation. A la demande de cette clientèle spéciale, le chantier naval Dubourdieu, devenu ” Emile Dubourdieu et fils ” va faire évoluer sa pinasse de travail en petit bijou de plaisance: bois précieux vernis, cuivre et laiton polis, moteurs à pétrole dès 1909, puis à essence à partir de 1922, jusqu’à la transmission qui, à crémaillère pour l’ostréiculture, passe en ligne d’arbre directe pour la plaisance. Ces « pinasses de Monsieur » étaient pilotées par des marins du Bassin d’Arcachon, petits pêcheurs qui se louaient pour une saison. On organisait des pique-niques très fins, avec les messieurs en canotiers et les dames en robes légères de lin clair. Dubourdieu devient le spécialiste des pinasses automobiles.
L’aventure Dubourdieu
Dès lors, lentement, la part des bateaux de plaisance dans la production du chantier devient de plus en plus importante, pour être majoritaire dès les années 50. C’est à Jean-Pierre Dubourdieu que les pinasses actuelles doivent leurs lignes élégantes. Il « invente » en 1981 les « Classic Express », pinasses de la nouvelle génération, lignes classiques et construction moderne en bois stratifié. De 1981 à 1999, une quinzaine de ses Classic Express sera mise à l’eau, ainsi que des créations sur mesure pour une clientèle de plus en plus prestigieuse, dont Philippe Starck.
En 2000, après 6 générations de Dubourdieu, le chantier se retrouvait sans successeur. L’aventure Dubourdieu aurait pu s’arrêter là. Cependant, elle retrouve une seconde vie grâce à Emmanuelle et Béatrice Martin qui osent le pari fou de reprendre l’entreprise historique. Œnologue de formation, titulaire d’un Master de Gestion, bilingue, Emmanuel Martin est un enfant du Bassin d’Arcachon. Ses débuts en œnologie le conduisirent à gérer des propriétés viticoles pour le compte d’un grand groupe financier. Béatrice, sa femme, dirigeante d’une agence de voyages spécialisée dans la conception sur mesure de voyages haut de gamme, sportive accomplie, et meneuse d’équipe, avait envie de concevoir du sur-mesure tout aussi prestigieux mais plus tangible. Leur parcours a donc croisé celui de Jean-Pierre Dubourdieu qui cédait son affaire à plus de 70 ans. Le couple est tombé sous le charme et donc les pinasses ne mourront pas. Elles vont connaître une nouvelle vie, même si au début des années 2 000 le carnet de commandes est proche de zéro.
Innovations et patrimoine de Luxe. Dubourdieu se modernise alliant gestes ancestraux et technologies
Désormais « Dubourdieu 1800 », l’entreprise se modernise et internationalise ses ventes, portée par le phénomène d’engouement pour les bateaux de caractère, mis au goût du jour par les italiens, et pourtant fabriqués depuis plus de 200 ans à Gujan-Mestras. Le chantier a su maintenir son niveau d’excellence. De nombreuses unités aux finitions exceptionnelles ont été fabriquées dans l’atelier du Port de Larros. L’acajou et le teck massifs, matériaux nobles de la construction navale sont façonnés, ajustés, pour construire des navires d’exception avec des carènes personnalisées à la virure près. Chaque Dubourdieu est le fruit d’une succession d’opérations qui ne peuvent être mécanisées, où le tour de main et l’œil du maître sont irremplaçables. Le chantier a su également tirer parti des évolutions technologiques, en protégeant leurs coques par une stratification en fibres composites, en installant dans leurs bateaux les moteurs écologiques les plus innovants du marché et en tirant profit des plus récents calculs de carènes et de rendements d’hélices. Mais il reste fidèle à un savoir-faire séculaire, avec les derniers charpentiers de marine, parce que l’œuvre d’art ne peut naître que de la main de l’homme.
En 2014, le White Ocean en partenariat avec la maison Courrèges voit le jour en reprenant les codes de la célèbre maison de couture et offre une belle exposition marketing à Dubourdieu qui voit ses commandes s’accélérer. Le White Ocean appartient d’ailleurs aujourd’hui au chantier et est proposé, au sein d’une nouvelle division du Chantier Dubourdieu, à la location sur le Bassin avec skipper et prestations d’hospitalité haut de gamme.
Toute une gamme personnalisable. Dubourdieu les pinasses de luxe…
La gamme Dubourdieu se compose maintenant de plusieurs familles et modèles.
« Tous nos modèles sont personnalisables à souhait mais possèdent comme point commun le fait d’être construits entièrement à partir d’un châssis en bois avec des charpentiers de marine et une équipe d’artisans qui compte une douzaine de personnes à plein temps. Pour construire un Dubourdieu, il faut compter entre 14 000 et 15 000 heures de travail manuel sur une période de gestation qui va durer près de neuf mois. Au rythme du vieillissement du bois, ce métier d’orfèvre va nous permettre de mettre à l’eau entre trois et cinq unités maximum par an. Nos bateaux sur mesure coûtent entre 400 000 et plus d’un million d’euros. Ils séduisent une clientèle majoritairement française mais également étrangère. Nous avons même livré en 2021 notre premier bateau aux Etats-Unis. Exigeants mais passionnés, nos acheteurs sont aussi bien d’anciens voileux que des amoureux de voitures anciennes, des collectionneurs, des épicuriens ou autres esthètes. Quand ils arrivent dans nos ateliers, ces futurs propriétaires sont désarmés et un peu perdus face aux nombreuses options possibles. Nous les accompagnons durant cette période qui va s’étaler sur plusieurs mois avant la mise à l’eau du bateau à moteur de leur rêve.», indique Emmanuel Martin.
Des bateaux traditionnels aux icones de luxe
Fabrication artisanale, cousu-main, excellence, matériaux très haut de gamme, sur-mesure, accompagnement sont les maîtres-mots de l’entreprise. Preuve de cette réussite, le chantier naval DUBOURDIEU a été labellisé EPV (Entreprise du Patrimoine Vivant) symbole de l’excellence française et de son savoir-faire unique. De nouvelles voies ont également été ouvertes : celle de la location de bateaux aux particuliers, ainsi qu’un développement à l’international sans précédent, tout en faisant perdurer la tradition patrimoniale dans la conception de ces bateaux de caractère.
Dubourdieu, artisan du luxe maritime
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